Comment le cadmium présent dans les algues modifie le cycle du carbone
L'augmentation de la concentration de dioxyde de carbone dans l'atmosphère au cours des dernières décennies a été associée au changement climatique mondial. Par conséquent, la recherche et la compréhension du cycle biogéochimique du carbone sont d'une importance primordiale. La biosphère terrestre et océanique joue un rôle majeur dans le cycle mondial du carbone par la production et la conversion de matière organique.
Pour la première fois, les scientifiques ont réussi à évaluer l'impact du cadmium sur l'assimilation du carbone dans les microalgues. Les plantes ont développé un procédé de fixation du CO2 dans le carbone organique en utilisant l'enzyme ribulose-1,5-bisphosphate carboxylase / oxygénase (RuBisCO), qui est considérée comme la protéine la plus abondante de la biosphère. Les microalgues sont de petits organismes eucaryotes où RuBisCO est concentré dans l'organite spécifique appelée pyrénoïde. Les algues contenant des pyrénoïdes sont responsables de 28 à 44% de la fixation mondiale du carbone, de sorte que les microalgues jouent un rôle clé dans le cycle biogéochimique du carbone.
Une équipe de scientifiques du CNRS, de l'Université de Pau et des Pays de l’Adour, de Martin-Luther-Universität Halle-Wittenberg, de l'Université de Bordeaux et de l'ESRF a étudié une algue verte unicellulaire présente dans le monde entier dans les sols et l'eau douce, appelée Chlamydomonas reinhardtii, en utilisant des techniques de l'imagerie par rayons X et par la spectrométrie de masse des ions secondaires à l'échelle nanométrique (NanoSIMS). Les études avec la NanoSIMS à l’UPPA ont indiqué la modification du métabolisme de carbone dans la cellule à cause d’une contamination de cadmium. «Nos travaux à l'UPPA ont été très importants pour montrer que l’exposition au cadmium diminue le taux de fixation du CO2», explique Dirk Schaumlöffel, auteur correspondant de l'article.
Les résultats ont montré que le cadmium altère clairement l'assimilation du carbone chez C. reinhardtii cultivé dans des conditions mixotrophes. La mixotrophie signifie, dans ce cas, que les algues utilisent non seulement du CO2 mais aussi d'autres sources de carbone telles que les acides organiques. En raison de la séquestration pyrénoïdale du cadmium, la fixation du CO2 est limitée pendant l'exposition au cadmium. La mixotrophie pourrait donc permettre au phytoplancton de survivre aux épisodes de pollution par les métaux toxiques. Bien que la mixotrophie semble rendre les écosystèmes aquatiques plus résistants, l'altération de la fixation du CO2 par les métaux toxiques pourrait contribuer au déséquilibre du cycle biogéochimique du carbone.
La prochaine étape pour l'équipe est d'étudier l'influence d'autres métaux toxiques et de révéler la voie métabolique sous stress métallique. L’UPPA se chargera des études subcellulaires avec la NanoSIMS.
Reference : Penen F. et al. Pyrenoidal sequestration of cadmium impairs carbon dioxide fixation in a microalga. Plant Cell Environ. 2019;1–17. https://doi.org/10.1111/pce.13674